Depuis sa découverte par Francine Shapiro en 1987, l’EMDR (Eye Movement Desensitization and Reprocessing), initialement reconnue pour son efficacité dans le traitement du trouble de stress post-traumatique (PTSD), a également montré des résultats prometteurs dans la prise en charge d’autres troubles psychologiques tels que l’anxiété, la dépression et les phobies. La particularité de l’EMDR réside dans son approche qui combine une stimulation bilatérale avec une réévaluation cognitive des souvenirs traumatiques dans un cadre thérapeutique favorisant la réactivation sécure des modalités sensorielles et émotionnelles des souvenirs cibles, facilitant ainsi un retraitement adaptatif de ces derniers. Ce processus permet de diminuer l’intensité émotionnelle associée aux souvenirs traumatiques, offrant aux patients une avancée durable quant aux perturbations ressenties au quotidien. Pourtant, une question cruciale persiste parmi les patients potentiels : « L’EMDR est-elle adaptée et efficace pour moi ? » Cette préoccupation est légitime, car chaque individu est unique, avec des symptômes et des expériences de vie qui lui sont propres. La thérapie EMDR vise à désensibiliser les souvenirs traumatiques et à permettre un traitement plus adaptatif des informations. Le travail en amont du protocole EMDR et le respect de la temporalité du patient s’avère fondamental pour son efficacité. Par exemple, les individus avec une histoire de traumatismes complexes ou de dissociation nécessiteront souvent une phase de préparation plus longue pour stabiliser leur état émotionnel avant d’entamer un protocole de traitement.

L’Efficacité de l’EMDR pour différents types de problématiques

L’EMDR a été étudiée dans divers contextes pour déterminer son efficacité. Les recherches montrent que cette thérapie peut être bénéfique pour une gamme variée de troubles liés au traumatisme. L’EMDR a montré une efficacité notable pour une variété de troubles traumatiques, y compris le PTSD, les troubles anxieux et la dépression (Shapiro, 2021, p. 35). Les recherches montrent que l’EMDR est particulièrement efficace pour le traitement du PTSD. Une méta-analyse de Watts et al. (2013) a souligné que l’EMDR et les thérapies cognitivo-comportementales (TCC) sont les traitements les plus étudiés et les plus efficaces pour le PTSD .

L’EMDR a également montré des résultats positifs pour les troubles anxieux, y compris les phobies, le trouble anxieux généralisé (TAG), le trouble panique et le trouble obsessionnel-compulsif (TOC). Par exemple, une étude de Gauvreau et Bouchard (2008) a démontré l’efficacité de l’EMDR pour le traitement du TAG. De même, Fernandez et Faretta (2007) ont rapporté des résultats positifs pour le traitement du trouble panique avec l’EMDR . Les phobies, y compris les phobies spécifiques et sociales, ont également été traitées efficacement avec l’EMDR. De Jongh et al. (2002) ont montré que l’EMDR peut réduire significativement les symptômes des phobies en peu de séances . Ces résultats sont corroborés par Marr (2012), qui a trouvé que l’EMDR est efficace pour le traitement du TOC .

La dépression est un autre domaine où l’EMDR a montré une grande efficacité. La dépression est souvent liée à des souvenirs pathogènes, c’est-à-dire des souvenirs stockés de manière dysfonctionnelle qui sont biologiquement actifs et à l’origine des symptômes de la maladie. L’EMDR aide à traiter ces souvenirs en réduisant la détresse associée et en facilitant un traitement plus adaptatif​​. Hofmann et al. (2014) ont démontré que l’EMDR est efficace pour le traitement de la dépression unipolaire chez les adultes . De plus, une étude de Bae et al. (2008) a montré des résultats positifs pour le traitement de la dépression chez les adolescents . Les patients rapportent souvent une amélioration significative de leurs symptômes dépressifs après quelques séances d’EMDR.

Les mouvements oculaires et autres formes de stimulation bilatérale utilisés dans l’EMDR aident à désensibiliser les souvenirs traumatiques, permettant aux patients de les traiter de manière plus adaptative. Les résultats sont souvent observés dès les premières sessions, offrant un soulagement rapide pour de nombreux patients. De nombreux patients rapportent une diminution significative de l’anxiété et des symptômes de PTSD après seulement quelques sessions d’EMDR (Shapiro, 2021, p. 41).

Traumatisme Simple vs Traumatisme Complexe

Il est essentiel de distinguer entre les traumatismes simples et les traumatismes complexes lorsqu’on évalue l’efficacité de l’EMDR. Un traumatisme simple résulte généralement d’un événement isolé, tel qu’un accident de voiture ou une agression unique. Ces événements uniques peuvent souvent être traités en quelques séances, car ils n’engendrent pas le même niveau de perturbation chronique que les traumatismes complexes. Les patients ayant vécu un traumatisme simple rapportent souvent des améliorations rapides et significatives après quelques sessions de thérapie EMDR, avec des réductions notables de l’anxiété et des symptômes de PTSD (Shapiro, 2021, p. 38).

En revanche, un traumatisme complexe est souvent le résultat d’expositions prolongées ou répétées à des situations traumatisantes, comme les abus pendant l’enfance ou les violences domestiques (Herman, 1992). Les traumatismes complexes impliquent généralement une perturbation plus profonde et durable, avec un retentissement important sur les assises identitaires, sur les modalités d’attachement et de relation et sur le fonctionnement au quotidien. Les résultats de l’EMDR pour les traumatismes complexes peuvent varier, nécessitant souvent un traitement plus long et plus intensif. Les patients ayant des traumatismes complexes peuvent nécessiter plus de sessions, mais l’EMDR reste une option viable pour le traitement de leurs symptômes. Ces patients bénéficient souvent de l’approche graduelle et structurée de l’EMDR, qui permet de traiter les souvenirs traumatiques de manière progressive et sûre (Shapiro, 2021, p. 49).

Les recherches montrent que l’EMDR peut aider à réintégrer des souvenirs traumatiques complexes en favorisant une meilleure régulation émotionnelle et en facilitant la résolution des souvenirs fragmentés. Par exemple, des études ont montré que l’EMDR peut réduire l’hyperactivation de l’amygdale et augmenter l’activité dans les régions préfrontales, aidant ainsi à traiter et à intégrer les souvenirs traumatiques complexes (Shapiro, 2021, p. 45).

La non-exposition postérieure au Traitement

L’un des avantages majeurs de la thérapie EMDR réside dans sa capacité à atténuer l’intensité et la fréquence des perturbations causées par des expériences traumatiques. Cet outils thérapeutique repose sur un protocole impliquant une réévaluation approfondie de la perception de soi du patient, tant sur le plan cognitif que sensoriel et émotionnel. Les souvenirs traumatiques sont souvent liés à des croyances négatives sur soi-même, comme se sentir impuissant ou coupable. De plus, le retraitement des souvenirs permet de désensibiliser les réponses émotionnelles intenses associées à ces souvenirs, et d’atténuer les sensations corporelles désagréables qui les accompagnent, comme la tension musculaire ou les palpitations cardiaques. Il est essentiel de s’assurer que le souvenir traumatique soit clairement identifié comme un événement passé ; sans cette reconnaissance, un travail préalable de stabilisation est requis avant d’entamer le protocole EMDR.

Cette phase de stabilisation peut inclure des techniques de gestion du stress et des stratégies d’autorégulation émotionnelle pour renforcer la sécurité et le confort du patient. Ce processus offre une sécurité émotionnelle accrue, car il protège les patients contre une réexposition continue à leurs traumatismes. Contrairement à d’autres approches thérapeutiques où l’exposition répétée au traumatisme est utilisée comme une méthode de désensibilisation, l’EMDR minimise ce risque en permettant un traitement indirect et contrôlé des souvenirs. Ainsi, le cadre thérapeutique devient plus stable, ce qui encourage les patients à s’engager pleinement dans leur processus de soin. La sécurité perçue dans ce cadre favorise un environnement où les patients peuvent aborder leurs souvenirs douloureux sans craindre d’être submergés par l’émotion.

Contre-Indications de l’EMDR

Bien que l’EMDR soit efficace pour de nombreux patients, il existe certaines contre-indications. Les individus présentant des risques suicidaires, des risques de passage à l’acte violent, ou des antécédents psychiatriques avec risque de décompensations peuvent ne pas être des candidats idéaux pour cette thérapie sans une évaluation et une prise en charge appropriées préalable aux séances d’EMDR. Les patients avec des troubles psychiatriques graves nécessitent une stabilisation préalable et un suivi attentif pour éviter des exacerbations potentielles de leurs symptômes (Brown, 2019, p. 56).

Les risques suicidaires et les tendances violentes représentent des contre-indications majeures, car l’activation émotionnelle induite par l’EMDR pourrait exacerber ces tendances sans un encadrement thérapeutique intensif. De plus, les antécédents de troubles psychotiques nécessitent une prudence particulière, car la thérapie EMDR pourrait potentiellement déclencher ou aggraver les symptômes psychotiques chez ces patients. Une évaluation complète par un professionnel de la santé mentale est essentielle pour déterminer l’aptitude d’un patient à suivre une thérapie EMDR (Smith, 2020, p. 58).

Les patients souffrant de troubles dissociatifs graves ou de troubles de la personnalité peuvent également nécessiter des modifications spécifiques de l’approche EMDR pour garantir leur sécurité et leur efficacité thérapeutique. Dans certains cas, des thérapies complémentaires ou une préparation psychothérapeutique intensive peuvent être nécessaires avant d’initier l’EMDR (Brown, 2019, p. 60). L’utilisation prudente de l’EMDR dans ces contextes permet de maximiser les bénéfices thérapeutiques tout en minimisant les risques potentiels pour les patients.

Conclusion

En conclusion, l’EMDR se présente comme une approche thérapeutique innovante et efficace pour le traitement de divers troubles psychologiques liés aux traumatismes, allant bien au-delà de son application initiale pour le trouble de stress post-traumatique (PTSD). Son efficacité est corroborée par de nombreuses études scientifiques qui soulignent sa capacité à réduire rapidement et de manière durable les symptômes traumatiques, ce qui en fait une méthode recommandée dans le domaine de la psychothérapie.

L’EMDR a démontré son utilité non seulement pour le PTSD, mais également pour une variété de troubles tels que l’anxiété, la dépression, les phobies, et les douleurs chroniques. Ces résultats élargissent le champ d’application de cette thérapie et en font une option attrayante pour de nombreux patients souffrant de troubles psychologiques divers. Toutefois, l’application de l’EMDR nécessite une évaluation préalable et une préparation adéquate, particulièrement dans les cas de traumatismes complexes et de troubles dissociatifs. Une telle préparation est cruciale pour garantir que le traitement soit mené de manière sûre et efficace. Il est donc essentiel que les thérapeutes soient bien formés et que les patients soient correctement informés sur le processus thérapeutique et ses implications. Une compréhension claire des attentes et des étapes du traitement permet de maximiser les bénéfices thérapeutiques tout en minimisant les risques.

Bibliographie

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Hofmann, A., Hase, M., & Lehnung, M. (2014). EMDR and depression: A case series. Journal of EMDR Practice and Research, 8(2), 99-107.

Shapiro, F. (2021). Eye Movement Desensitization and Reprocessing (EMDR) Therapy: Basic Principles, Protocols, and Procedures. 3rd ed. New York: Guilford Press.

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